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Date de mise à jour : 30/10/2017 (60 nouvelles épaves, 41 mises à jour)

CONCARNEAU ET LES CANONS DE LA VENUS

Phase 4:
Leur installation en Ville-Close et sur le rond-point de Kerviniou
Conception et réalisation : Louis et Marie Le Sellin

Canon en Ville-Close

 

Après le volet 1 traitant de leur récupération aux Iles de Glénan, le volet 2 relatif à leur traitement et le volet 3 concernant la fabrication des affûts, nous voici parvenus au dernier volet de la quadrilogie traitant des canons de la Vénus , leur installation en Ville-Close et sur le rond-point de Kerviniou .

article presse

article presse

Le Télégramme 16 janvier 1991

Le Télégramme 8 mars 1991

Panneau Concarneau

Signalétique dans l'embrasure d'exposition

"Témoins émouvants de l’un des nombreux drames de la mer, les canons de la Vénus ne garniront plus les sabords d’une nouvelle frégate mais feront désormais partie des multiples jalons pour notre Histoire locale."
Michel GUEGUEN – Le naufrage de la Vénus - Epilogue

Les calibres des canons ont été désignés à partir du XVIe siècle par référence au poids des boulets qu’ils lançaient. Les diamètres des boulets servaient d’étalon pour les différentes parties des bouches à feu. Par contre, les mortiers, les pierriers et les obusiers furent toujours désignés par le diamètre de l’âme exprimé en pouces et lignes.

La multiplicité des calibres et des matériels avait une double cause, technique et historique. Technique parce que jusque là, chaque fondeur fabriquait ses bouches à feu et ses boulets sans se préoccuper de ce que faisaient ses concurrents. Historique parce que peu de puissances avaient une unité territoriale. L’armée de Charles Quint (1) par exemple, avait des pièces flamandes, espagnoles et autrichiennes qui différaient sur de nombreux points. En outre, toutes les armées utilisaient des matériels pris à l’ennemi.

La réduction du nombre et la codification des calibres avaient été recherchées précisément par Charles Quint sous l’empire de la nécessité ; puis en France et ailleurs dans la seconde moitié du XVIe siècle (édit de Blois 1572). Mais la diversité n’en subsistait pas moins, favorisée par la recherche d’un système idéal, au point que Montecucolli, l’adversaire de Turenne, écrivait au milieu du XVIIe siècle : "Chaque prince, chaque général, chaque fondeur a voulu inventer selon son caprice de nouveaux calibres et de nouvelles dimensions".

Le désordre des calibres avait été vivement ressenti pendant les guerres de Louis XIV. C’est pourquoi le nouveau roi avait jugé nécessaire de fondre une nouvelle artillerie allégée et définie rationnellement.
Gribeauval – cahier n° 24 – p 21 et 22)

Mise à Feu

Plan d'un canon

L'allumage se faisait d’abord par le boutefeu (1) classique manié par le pointeur ou au commandement par un servant. Placer, en se gardant du recul, l’extrémité d’une mèche tenue au bout d’un bâton de deux pieds dans le bassin du canal de lumière n’était pas une manœuvre instantanée. De plus, tenir la mèche rougeoyante sans excès était un souci constant.


Enfin, ce feu représentait un danger permanent quand, en châtrant la gargousse (2), le pointeur avait couvert le pont de poudre.
L. Denoix et J. N. Muracciole - Historique de l’artillerie de la Marine de ses origines à 1870 - Tome 38- 2e fascicule- n° 148 p. 331.


Gargousse : inventée par le Lieutenant Général Du Brocard (Gribeauval - cahier n° 24 p. 168)

1- Coussin - 2 - Coussinet - 3 - Coin de mire
4 - Corne d'amorce - 5 - Épinglette
6 - Gargoussier en cuir de vache, portant l'indication du calibre et le n° de la pièce.
7 - Dégorgeoir pour crever la Gargousse
8 - Boutefeu en bois tourné
9 - Tire bourre - 10 - Écouvillon garni en peau de mouton
11 - Refouloir dans l'âme du canon
12 - Grains de poudre - 13 - Gargousse en parchemin
14 - Valet - 15 - Grappe de raisin
16 - Dégorgeoir à vrille - 17 - Dégorgeoir à vilebrequin
18 - Boulet à deux têtes - 19 - Boulet rond
20 - Platine en plomb pour protéger la lumière
21 - Tape en liège - 22 - Faubert
23 - Cuillère ou lanterne - 24 - Pince en fer

'l'artillerie de mer border= /

Tableau extrait de ''l'artillerie de mer de la marine française 1674-1856 '' Paru dans la revue ''Triton n° 84'', supplément du ''Neptunia n° 89 (1er trimestre 1968)

 

Calibres des canons

Dimensions calibres 12 long et court - Neptunia n° 89 - Dimensions des canons de calibre 12 de la Vénus

Pour expliquer les 15 cm manquants, nous n’avons d’autre explication que cet article de Jean Boudriot : (1)

"Malgré le raccourcissement de cette nouvelle artillerie, les pièces sont encore considérées comme trop longues pour certains types de bâtiments et à l’occasion de la construction de frégates à Saint Malo sur les plans de l’ingénieur Sané, il est envisagé la création de pièces courtes pour les quatre petits calibres (12, 8, 6,4)."

Sur la totalité des 10 pièces récupérées sur les lieux du naufrage, en 1978 et 1990, aucune ne correspond réellement aux dimensions du calibre 12 défini dans le tableau précédent (1)
Pour mémoire, la Vénus a été construite à Saint-Malo sur les plans de l’ingénieur Sané.

Néanmoins, c’est avec beaucoup de lenteur que fut adoptée la mise à feu par silex. Elle était employée pour les fusils dès 1630 mais c’est en 1746 que nous en trouvons la mention pour la première fois en artillerie. M. De Rostaing, commandant l’artillerie de LA BOURDONNAIS à bord de l’Achille écrit le 6 juillet 1746 : "Toute mon artillerie était garnie de platines de fusil appliquées à côté de la lumière, par le moyen desquelles et d’un bout de ligne attaché à la gâchette que le pointeur tirait à propos lorsque le mouvement du navire mettait la pièce vis-à-vis de l’objet, on faisait partir le feu aussi promptement que le coup d’œil".

C’est 17 ans après, en 1763, que la Marine de Guerre envisage l’emploi de la mise à feu par silex. Les essais commencent en 1766 et se prolongent longuement. C’est après 1781 que ce système est enfin adopté mais il est considéré comme fragile . On lui reproche également la difficulté de placer une platine couvrant la lumière pour éviter les mises à feu intempestives. Les canonniers de l’Empire conservent encore le boutefeu mais en principe ils ne s ’en serviront plus qu’en secours.

Le traitement a révélé des numéros de séries : 99 - 119 – 128 – 139, placés entre les tourillons au niveau du 2e renfort ainsi que des percées sous la plate-bande de culasse. Selon nos informations, après le naufrage, 16 pièces auraient été remontées, sans précision de calibre. 6 en 1978, 4 en 1989, de calibre 12, ce qui porterait à 26 le nombre de canons récupérés. Il est probable que d'autres pièces gisent sur les lieux du naufrage et pourraient nous donner des indications complémentaires sur l'industrie de l'armement d'INDRET sous la direction de WILKINSON en cette fin de XVIII e siècle.(*)

(*) INDRET
Monsieur DE SARTINE, Ministre et Secrétaire d' Etat de la Marine décida d'y établir une fonderie de canons en 1777. Il s'agissait de rénover ce genre de fabrication par la mise en vigueur de procédés déjà employés en Angleterre. Monsieur WILKINSON, construisit deux fours à réverbère. La construction et l'installation des ateliers furent réalisées en un temps record puisque dès 1778 on commença à couler les canons pleins et en « chûte »  ; la production des pièces brutes atteignit une cadence rapide au point d'être surabondante face aux capacités de forage. Le choix d 'INDRET fut conditionné par plusieurs critères favorables le ravitaillement en fontes et en charbon serait facilité par la proximité de la Loire ; des carrières existant à proximité fourniraient un bon sable de moulage qui serait étuvé dans des châssis en bois ; la présence du fleuve procurerait l'énergie nécessaire au forage ; l'installation d'un champ de tir serait aisé dans les prairies basses de l'extrémité occidentale de l'île ; enfin l'isolement de celle-ci serait favorable à la mise au point, à l'abri d'indiscrétions, d'une fabrication précieuse pour la défense du royaume .
Histoire de la fonderie de Ruelle chapitre IV, INDRET (1777-1824)- voir également dans Gaspard Monge l'art de fabriquer des canons p.132 .

Coupe d'un canon

Diaporama

Ce diaporama est le premier d'une série de quatre. Les suivants traitent des différentes étapes de la restauration ainsi que de l'histoire de ces canons.

Volet 2 : Mise en traitement de déchloruration selon la méthode utilisée par E.D.F. pour le Titanic et le Mauritius...

Volet 3 : Fabrication des affûts de canons selon les plans communiqués par Monsieur Jean BOUDRIOT.

Volet 4 : Installation des canons en Ville-Close et au rond- Point de Kerviniou.

Sources

Références et citations : Archives de La Marine de Lorient “ Le naufrage de la Vénus - 1781” par Michel Guéguen.