Le Nantes-Bordeaux sous le pont transbordeur à Nantes (A.D. 44 (2 Fi Nantes 32)
NANTES BORDEAUX, cargo à passagers, grée en goélette 1608 brt, 880 net, construit par Les Ateliers et chantiers de la Loire, Nantes et lancé en 1883 pour la Nantaise de navigation à vapeur (1).
Il mesure 240,8 x 33,5 x 19,2 pieds. Il est propulsé par un moteur compound deux cylindres construit par les mêmes chantiers et qui développe 230 HP.
Il est affrété en 1884, au transport du corps expéditionnaire du Tonkin avec le VILLE DE SAINT-NAZAIRE (2) et le NANTES-LE HAVRE (3). Puis à son retour, l'Administration des Colonies lui confie le passage des immigrants indiens des Etablissements français de l'Inde vers les Antilles (voir ci-dessous).
A.D. 44 (7 R 4 / 26 f° 1187)
Le navire est transféré le 9 mai 1890 à la Compagnie des Bateaux à Vapeur du Nord (4) et garde son nom d'origine.
Il fait du cabotage entre les ports français et anglais de la Manche avec ceux de l'Atlantique. Le 2 janvier 1896, il percute la tourelle inachevée de la Vinotière. Celle-ci est arrachée de sa base et bascule d'un bloc :
"Vers 18 heures, le 2 janvier 1896 le steamer Nantes-Bordeaux de la Compagnie du Nord installée à Dunkerque, descend le chenal du Four. Il heurte de plein fouet la tourelle et la bascule à l’eau, scellements arrachés. Le vapeur de construction solide a seulement l’étrave écrasée et une voie d’eau dans le peak avant, ce qui ne l’empêche pas de gagner Brest seul, et d’aller s’échouer sur la grève du Château, pour s’y faire réparer. Des charpentiers lui confectionneront une étrave provisoire en bois et il pourra continuer son voyage."
Dans la nuit du mercredi au jeudi 13 mai 1896, un autre passage dans le chenal du Four va lui être fatal.
Après avoir franchi sans encombre le chenal du Conquet, il percute une roche et fait eau par son étrave déjà endommagée. Le navire pique rapidement du nez et coule.
Le capitaine Paunet ordonne l'abandon du navire à 5 milles dans le nord du chenal, à hauteur des roches de Portsall.
Le Figaro (15/05/1896)
Cette immigration a débuté en 1854 s'est officiellement achevée en 1877 en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane française. Son arrêt définitif a eu lieu en 1884 dans les Antilles françaises. De 1854 à 1887, 42 595 immigrants indiens furent introduits en Guadeloupe. Il y a eu 6 748 immigrants indiens en 1859 à la Martinique. S'agissant de cette immigration vers les autres Iles de la Caraïbe, elle fut plus importante dans certaines îles, notamment à Trinidad et Tobago où elle dura de 1838 à 1917, l'esclavage ayant été aboli dans les Iles britanniques en 1834. "Le choix des colons se porte sur les indiens en provenance des Indes anglaises et françaises. Ils y voient un double avantage : l'opinion, chatouilleuse dès que quelque chose lui rappelle l'esclavage, ne fait pas le rapprochement entre coulis et esclaves, comme elle le fait immédiatement quant ils s'agit d'engagés noirs. De plus, la péninsule indienne regorgeant d'hommes affamés qu'elle ne peut nourrir, la manoeuvre peut presque passer comme humanitaire. Les arracher à leur terre natale, c'est aussi les arracher à la misére. La France n'étant plus que marginalement présente en Inde, à travers son comptoir de Pondichéry, il faut composer avec l'Angleterre, ou plus exactement avec le gouvernement anglo-indien, pour obtenir l'autorisation d'organiser cette migration. Celui-ci n'est pas trop dur à convaincre. La famine sévit dans la principauté de Madras et dans les districts du Nord de l'Inde. Et c'est lui qui doit subvenir aux besoins de ces plusieurs millions de sujets indiens affamés."
"Ces Indiens furent emmenés aux Antilles en hommes libres mais sous contrat pour accomplir des travaux des champs que les Noirs ne voulaient plus totalement assumer. Ils laissaient les côtes de l'Inde à partir de ports tels que Madras, Pondichéry, Bombay, sans trop savoir exactement ce qui les attendait. Ils furent embarqués sur des voiliers en bois de 1000 tonnes jusqu'en 1880 puis sur des navires à vapeur de 1500 à 2000 tonnes. Ces navires à vapeur permirent de réduire de moitié le temps de la traversée, surtout après le percement du canal de Suez. La distance de Pondichéry à la Guadeloupe, par exemple, fut réduite d'une centaine de jours à une quarantaine." Archives Combat Ouvrier
"Avant l'embarquement, un agent du gouvernement anglo-indien vérifie qu'ils sont bien libres de leur décision, et remet au capitaine du navire les autorisations qui lui permettront de justifier son chargement, lors des possibles contrôles effectués en mer par les flottes anglaises et françaises. D'ailleurs, il n'y a pas que le chargement qui soit inspecté. Les bateaux transportant des coulis doivent répondre à des critéres stricts, seuls capables de garantir un faible taux de mortalité pendant un voyage qui s'avère souvent long : deux mois en moyenne pour atteindre les Antilles. Les émigrants doivent disposer d'un espace suffisant pour voyager dans de bonnes conditions. La nouriture, l'eau doivent avoir été prévues en consèquence et une couche propre leur être fournie. De plus, pour veiller à leur santé et s'assurer que les mesures d'hygiène sont bien respectées, deux médecins accompagnent chaque navire, un occidental, et un Indien"
"Mais souvent trop nombreux sur les navires, les émigrants étaient sujets à toutes sortes de maladies : la grippe, la dysenterie et autres maladies pulmonaires, le choléra, lui, plus fréquent était beaucoup plus mortel. Les naufrages pouvaient, eux aussi, décimer tous les individus d'un convoi. Ainsi le «Souvenance», transportant des travailleurs de Pondichéry à la Martinique, fit naufrage dans le canal de Mozambique avec 371 passagers. S'agissant de l'organisation sur les navires, elle était différente de celle sur les navires négriers en provenance des côtes africaines. A bord les hommes étaient séparés des femmes. Entre les deux, les couples mariés sans enfant étaient séparés de ceux qui avaient des enfants. Un médecin veillait à la santé et au respect entre les membres de l'équipage et ces "contractuels". Toutefois tout ceci n'empêchait ni les révoltes des immigrants, ni les sévices commis par l'équipage. Dans les plantations, ils s'occupaient de l'entretien des plantations de cannes, des troupeaux de bovins notamment des taureaux qui tiraient sous joug le cabouèt (cabrouet : la charrette) de canne à l'usine. Les femmes assuraient les services ménagers chez les planteurs blancs. La plupart de ces immigrés habitaient sur les habitations et vivaient dans des conditions d'hygiène inhumaines."
Immigrants indiens en Martinique |
1. La Compagnie Nantaise de Navigation à Vapeur est une ancienne compagnie maritime française. Elle est fondée le 28 janvier 1882. Son premier président est Rémy Bernard. En octobre 1917, elle est rachetée par la Compagnie générale transatlantique et par les Chargeurs de l'Ouest, Eugène Pergeline également président des Chargeurs de l'Ouest en devient le président.
2. VILLE DE SAINT-NAZAIRE (1505 BRT) : cargo lancé le 17 octobre 1883 sous le nom de NANTES HAMBOURG par les chantiers Kish Boolds à Sunderland pour La Compagnie Nantaise de Navigation à Vapeur. Cette dernière le renomme en 1884 VILLE DE SAINT-NAZAIRE. Il est vendu en 1905 et devient l' HERLEVE puis revendu en 1907, il est rebaptisé ELLEKER. En 1908, il devient l'ORION avant d'être torpillé à 10nm S Flamborough Head, le 25 avril 1918 sous le nom de SOTE.
Maquette d'un vapeur mixte
3. NANTES-LE HAVRE (1518 BRT) : Cargo, lancé en 1883, par les Ateliers et Chantiers de la Loire pour la Cie Nantaise de Navigation à vapeur. Il coule à Alger, le 2 février 1899 et sera féraillé à Marseilles.
4. Compagnie des Bateaux à Vapeur du Nord : 1853 : Fondation pour relier Dunkerque à Cronstadt (Russie). 1873 : Ouverture de lignes sur l'Afrique du Nord. 1892 : Compagnie Générale des Bateaux à Vapeur à Hélices du Nord. 1927 : Rachetée par la Société Anonyme de Gérance et d'Armement 1939: 13 navires 1957 : 12 navires. 1970 : Fin de l'armement