Frégate météo, N° de coque F13, construite aux USA, type S2-S2-AQ1 (frégate de classe Tacoma) et lancée le 18 mars 1944 sous le nom de ROANOKE, par l'American Ship Building Company, Lorain, Ohio (yard 846). Elle est mise en service pour l'US NAVY sous le nom de USS LORAIN (PF-93
Elle mesure 92,7 x 11,5 x 3,7 mètres pour un déplacement de 1400 tonnes. Elle est propulsé par deux turbines à vapeur alimentées par trois chaudières qui développent 4101 kW.
USS LORAIN a quittée Baltimore le 28 Janvier 1945 pour Norfolk, en Virginie, puis les Bermudes où elle a été utilisée comme Garde côte pour sa formation . Après une formation dans la baie de Casco, Maine, elle a rallié, le 11 Avril, Terre-Neuve, sa nouvelle base de patrouille. Opérant à partir d'Argentia et plus tard de Reykjavík, en Islande, elle fournissait des rapports météorologiques pour les eaux côtières du Groenland.
USS LORAIN est retourné à Boston, le 14 Septembre, a effectué une patrouille météo au large de la Nouvelle-Angleterre à la fin octobre, puis a navigué dans les Caraïbes . Une escorte l'a emmenée à Recife, au Brésil, au début de 1946, et après deux patrouilles météorologiques aux Bermudes, elle est revenue à Boston le 7 Mars, et a été désarmé le 14 mars 1946.
Lancement de l'USS LORAIN |
La frégate USS LORAIN (à droite) |
Elle a été vendue le 26 Mars 1947 à la marine française et renommée LAPLACE, n° de coque F13. Désarmée un an plus tard, après son achat par le Ministère des travaux publics en 1948. Elle rejoint le port de Brest pour son réaménagement.
Elle reprendra du service comme navire météorologique dans le cadre de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) en Atlantique nord avec les trois autres navires météorologiques français : LE MERMOZ, LE VERRIER (F716) et LE BRIX.
" Que voulez-vous que je vous dise c’est simple et malheureusement tellement dramatique ! Le LAPLACE, une frégate, comme vous le savez, équipée spécialement pour les recherches météorologiques, était commandé par le capitaine de frégate Rémusat. Nous venions d'effectuer une croisière de vingt- quatre jours, durant laquelle nous avions touché au point K, par 43°de latitude et 18° de longitude, ce tjjtil nous mettait a environ 300 milles du cap Finistère. et avait permis nos météorologistes qui nous accompagnaient, et notamment à M. l'ingénieur Colcanap, de Brest, l’une des sommités françaises en la matière, de faire de nombreuses observations Intéressantes. Nous étions rentrés dè cette croisière pour aller prendre part aux fêtes d’inauguration de la nouvelle écluse du port de Saint-Malo.Fort sagement, le commandant décide de se mettre à l’abri dans la baie de La Fresnaye pour y passer la nuit de vendredi à samedi. N'étions-nous pas parmi les premiers prévenus du cyclone annoncé pour la soirée de samedi. A 18 h, (G.M.T), vendredi après-midi, le LAPLACE mouillait donc, à environ 800 à 1000 mètres au sud-est de la côte du fort La Latte. Tout allait bien à bord."
Et le commandant prit ses dispositions pour la nuit.
Nous avions mouillé notre bateau bout au vent et légèrement en travers du courant. La nuit tombait. Rien ne pouvait laisser prévoir la catastrophe qui allait se produire. Sans doute, notre bateau a-t-il, drossé par le courant, légèrement joué sur sa chaîne, et, par passes successives, armé une mine magnétique qui se trouvait par le fond et dont ne pouvions prévoir l'existence. Toujours est-il que vers minuit 15, alors que tout 1e monde dormait à bord, sauf l'officier de garde, M. Leduc, le second-maître de service, le météo Héti, les deux factionnaires de passerelle et de plage avant, et le personnel des machines, une explosion formidable ébranla le navire."
Autant qu’on puisse le savoir (d'après le récit des rescapés et les déductions que l'on peut faire) la mine a dû exploser par bâbord arrière, entre la salle des machines et les locaux des services météorologiques. Et tout de suite, le bâtiment accusa une gîte à tribord. Il s'est ensuite rapidement rempli d’eau jusqu’au pont principal, et a accentué sa gîte sur tribord. Devant l’impossibilité de mettre en marche notre Diesel de secours qui, seul aurait pu nous aider à y voir clair, nous avons essayé de sortir la plus grande partie du personnel de quart dans la salle des machines, inondée de mazout, et après avoir distribué les ceintures de sauvetage, nous avons mis à l’eau tous les moyens de sauvetage, c’est-à-dire uniquement quatre radeaux, car la baleinière, le youyou et les plates avaient été écrasés sur eux-mêmes à la suite du véritable saut effectué par le bâtiment au moment de l’explosion. Et la vedette est une embarcation impossible à mettre à l’eau en dehors des conditions normales. Par malheur, deux des radeaux, surchargés et mal dégagés, ont été pris sous le bâtiment lorsque celui-ci s’est retourné sur la droite, avant de couler.
Les blessés qui avalent été déposés dans la vedette, alors qu'on espérait tout de même pouvoir la mettre à l’eau, avant que le bâtiment chavire, y sont vraiment parvenus. Poussés par les courants, nos hommes durent revenir vers la côte, du côté du Fort La Latte. Une sortiè de naufragés, 14 au total put prendre pied dans la nuit sur la terre ferme. Les autres, qui se trouvaient sur un radeau, furent dérivés Jusqu’au Cap Fréhel, avant d’être pris par le contre-courant de la marée et d’être rejetés sur le sable de la plage de Saint-Cast, vers sept heures du matin.
Une troisième partie de nos hommes a pu être recueillie par le pétrolier "Port-Lyautey" a et par un pécheur Jersais. Enfin une dernière partie de l'équipage, dont j’étais, demeura accrochée à l’étrave du bâtiment, émergeant de la surface."
Commandant Rémusat |
Six rescapés du naufrage |
Monument aux victimes
Images de l'épave (Photos E. Feige) |
1. André Rémusat. La famille Rémusat (ou Rémuzat ou de Rémusat) est l'une des plus anciennes familles nobles de Provence. Ses origines remontent au XIIe siècle 2 . Leurs descendants se sont installés à Seyne puis à Marseille et à Paris. Les Rémusat anciens portaient : "De gueules à la gerbe d'or accompagné en chef de deux étoiles d'argent". Leurs descendants à Seyne puis à Marseille portent : "D'azur au chevron d'or accompagné en chef de deux roses et en pointe d'une hure de sanglier le tout d'or". À l'enregistrement de 1696 les pièces étaient d'or. Les rameaux établis à Paris portaient des pièces d'or. Commandant André Rémusat Né le 27 octobre 1900 - Décédé le 16 septembre 1950, en mer Baie de la Fresnaye, Saint-Caast-le-Guildo (Côtes-d'Armor). Entre dans la Marine en 1919. Enseigne de vaisseau de 2ème classe le 1er octobre 1920, port Cherbourg. Enseigne de vaisseau de 1ère classe le 1er octobre 1922. Officier breveté des Transmissions. Lieutenant de vaisseau le 5 juillet 1928. Au 1er janvier 1932, port Cherbourg. Capitaine de corvette puis capitaine de frégate, il est le dernier Commandant d'un bâtiment de surface français à être resté jusqu'au bout pour mourir avec ses hommes à bord de la frégate.
2. TMC (Torpedo Mine C), charge: 860-930kg. La TMC est une mine de sol, ce qui signifiait qu'elle s'installe sur le fond marin. Elle explose par la signature magnétique ou acoustique d'un navire de passage.
Pour une efficacité maximale, elle peut être posée que dans les eaux peu profondes allant jusqu'à 30 mètres. Quand un navire approche de l'aplomb d'une mine de fond mouillée à faible profondeur, côtes ou estuaires, la pression d'eau sur ce point de mouillage augmente progressivement, puis décroît brusquement pendant toute la durée du passage du navire, et subit des oscillations rapidement amorties. L'amplitude de cette variation de pression hydrostatique dépend de divers facteurs, profondeur de la mer, tirant d'eau et vitesse du navire, etc.
Pour éviter qu'une forte houle ne suffise à provoquer la mise à feu d'une telle mine, on combine le système à dépression avec l'un des systèmes précédents, magnétique ou acoustique, servant de commutateur au système à dépression.
Le système de mise à feu de la mine à dépression allemande comportait, un sac à air en caoutchouc, en communication par un large tuyau avec un réservoir en acier, à deux compartiments séparés par une cloison d'acier. Cette cloison est percée d'un trou central, obturé par une membrane de métal s'appuyant sur le fond du compartiment, un boulon, isolé de cette plaque, porte en dessous de lui une tige de métal se terminant en boucle et s'enfonçant dans le compartiment. Une pointe métallique fixée à un blochet sous la cloison a son extrémité au centre de la boucle de la tige. Le blochet et le boulon sont reliés par fil au circuit de mise à feu. Un petit trou dans la cloison reste ouvert et met les deux compartiments d'air en communication.
Au passage du navire sur la mine, la pression diminue sur le sac, celui-ci tend à regonfler et à aspirer rapidement l'air, la plaque d'acier se soulève et entraîne le boulon et la tige à boucle. Cette dernière entre en contact avec la pointe et le circuit électrique de mise à feu est fermé. Remarquons que la pression sur le sac commence à diminuer quand le navire commence à passer au-dessus de la mine, c'est-à-dire qu'au moment où le navire aura son centre au plus près de la mine celle-ci sautera
Mine type Torpedo Mine C
3. Louis Curcier était le médecin de 1° classe du bord. D'après les récits familiaux, il a été identifié grâce à son alliance. Louis Curcier fut nommé parrain de la promotion de 1952 de l’École de Santé Navale de Bordeaux.