The Battle of Quiberon Bay, Nicholas Pocock, 1812. (National Maritime Museum)
En août 1759, la guerre de Sept Ans bat son plein, quatre petits rochers à l'est de Hoëdic vont donner leur nom à une triste bataille navale contre les anglais. Le roi Louis XV, conçoit l'idée d’une invasion des îles britanniques, et donne pour ce faire, instructions à l'escadre de Brest d'aller chercher la troupe basée dans le Morbihan. Vingt et un vaisseaux, trois frégates et deux corvettes dotés de 1.500 canons doivent embarquer l'infanterie terrestre, soit au total environ 14.000 hommes, placés sous les ordres de l'Amiral de Conflans. Les navires sont rassemblés dans le golfe du Morbihan, prêts à transporter le corps expéditionnaire qui doit intervenir en Ecosse. Pour appareiller, le convoi attend l'escadre de Brest. Les Anglais sont bien renseignés sur nos défenses et nos engagements de forces, aussi alignent-ils trente quatre vaisseaux, ainsi que dix frégates et corvettes armés de plus de 2.000 canons… et comptent sur une supériorité numérique d'environ 3.500 hommes. Les îles sont bien pourvues en hommes et équipements : Belle-Ile, Houat, Hoëdic, l'île Dumet fortifiée par le Duc d'Aiguillon. L'amiral de Conflans pense qu'il faut amener l'ennemi, dirigé par l'amiral Hawkes, en baie de Quiberon, où il espère compenser son infériorité numérique par une subtile manœuvre : les placer entre la côte rocheuse très dangereuse (et ses batteries terrestres) et la flotte française.
Canon en bronze provenant du Soleil-Royal (Musée du Croisic)
La position de combat "en ligne" ne peut être respectée très longtemps, surtout que le vent a forci et changé et qu'il faut virer sous peine d'être bloqué à la côte, et ceci en laissant suffisamment d'espace entre chaque navire. Le Tonnant manque à virer, et cule. Les Anglais, au vent, s'infiltrent et engagent le combat. Le Thésée, vaisseau de 74 canons, vire précipitamment. Les sabords de sa batterie basse étant restés ouverts, il coule avec 630 de ses hommes dont Guy François Kersaint, Comte de Coëtnempren, son capitaine et deux de ses fils Jacques Guy François et Guy-François. Le Redoutable (80 canons) est capturé et ses hommes faits prisonniers. Le Superbe (70 canons), capitaine Montalais, coule avec ses 630 marins dans un un engagement contre le Royal George. Le Soleil Royal (navire amiral, 120 canons, 2500tx) se réfugie près de la côte, et au matin se trouve relativement esseulé (il n'y a plus que le Héros qui l'attend). Le Héros (74 canons) s'est laissé dériver pour protéger son navire amiral. Il n'est plus qu'une épave et son capitaine, M. de Sansay amène son pavillon.
Le Torbay et le Duke coulent le Thésée, Pl. N°4, Dessin de Pierre Rafin-Caboisse
L'amiral de Conflans se retrouve donc seul devant l'escadre de Hawkes, et préfère se saborder plutôt que de se rendre à l'ennemi. Il incendie son vaisseau. Sept vaisseaux, trois frégates et une corvette, après s'être allégés en passant leur artillerie par-dessus bord, se sont réfugiés dans la Vilaine… Les autres navires s’enfuient vers Rochefort. L'Inflexible (64 canons), capitaine Tancrède, ne pourra être relevé d'une vasière près d'Arzal, après rupture de ses amarres. Le Juste (70 canons), capitaine Saint-Allouarn, s’échoue dans l’embouchure de la Loire. Le HMS Resolution (74 canons), capitaine Henri Speke et le HMS Essex (64 canons), capitaine O'Brien, s’échouent sur le plateau du Four. Les anglais perdent entre 300-400 hommes, les français en perdent 2500. Cent quatorze blessés entreront aux hôpitaux de Vannes avant la fin du mois.
The day after, Battle of Quiberon Bay, Richard Wright Huile sur toile 635 x 762 mm -
National Maritime Museum, London
Le Thésée, vaisseau de 2e rang de 74 canons, construit par Pierre Salinoc à Brest en 1757. Il jaugeait environ 1500tx, pour des dimensions de 164 x 44 x 22 pieds. ses batteries étaient composées de 28 canons de 36 livres, 30 de18 livres et 16 de 8 livres.
"Quel affreux spectacle Monsieur, que celui du Thésée abîmé en un clin d'oeil ! Quel perte que M. de Kersaint qui commandait ce vaisseau et qui, pendant toute sa vie, s'est distingué par des services continuels, par les actions les plus brillantes et par un grand nombre de blessures honorables. Il ne me paraît pas possible qu'il se soit sauvé un seul officier ni un seul homme de l'équipage de ce vaisseau..."
Extrait du rapport de M. de Conflans au Duc de Choiseul.
Zone propectée
"La Bataille des Cardinaux : 20 novembre 1759" de Guy Le Moing, ISBN-10 : 2717845038
"La bataille des cardinaux 1759, cinquante vaisseaux de ligne dans la baie de Quiberon", Pierre Rafin-Caboisse, Ed. Cheminement. 2008
"Hawke: Quiberon Bay, 1759", R. Mackay, Ed. E.J. Grove, Great Battles of the Royal Navy (London, 1994).
"Le Combat des Cardinaux, 20 novembre 1759", Récit historique de Pierre de la Condamine, Ed. Esprit Large Alizes, 1982