Le SS BEATSA, ex CORBEACH
BEATSA, cargo, N° officiel 135490, lancé le 8 juillet 1913 sous le nom de VALEGARTH, par le chantier Sir Raylton Dixon & Co, à Middlesbrough (yard 583), pour la Rea Sg Co Ltd, Liverpool.
Managé en 1919 la Cory Colliers Ltd, Londres, il est acheté par cette compagnie et renommé CORBEACH. En 1935, c'est l'Angelus Sg Co Ltd, Londres, qui l'achète et le rebaptise BEATSA.
C'est un cargo d'une longueur de 245 pieds pour 36 pieds 2 pouces de largeur et 18 pieds 8 pouces de profondeur . Il est propulsé par un moteur à triple expansion de 185 NHP construit par Richardsons Westgarth qui lui donne une vitesse d'environ 7 noeuds. Il possède un pont, et il est mâté en goélette. Quatre cloisons répartissent les cales et il possède sept réservoirs de lest, d'une capacité totale de 573 tonnes.
"Le vapeur anglais Beatsa, qui se rendait de Carthagène (Espagne) à Gdynia (Pologne) avec un chargement de 17.000 caisses d'oranges représentant 1.000 tonnes environ, a été trompé par la forte brume qui régnait en mer et il est venu s'échouer ce matin à 2 h 30 sur la pointe Ouest du plateau rocheux des Serroux, à 2 milles environ au Sud de l'île Molène et à 1 mille dans le suroît de l'île Trielen. Le navire croyait doubler Ouessant dans l'Ouest et il a pris la corne de brume des Pierres-Noires pour celle du phare de la Jument.
Le Beatsa n'ayant pas la T. S. F., c'est le patron pêcheur Rocher, de l'île Molène, qui l'aperçut le premier dans sa position critique, alors que vers 5 heures il se rendait à la pêche. Il l'approcha le navire et le capitaine H. Cossentine, commandant le Beatsa, le pria d'avertir le port de Brest pour qu'on lui porte assistance aussi rapidement que possible.
Le Beatsa avait hissé entête de mât les pavillons N. C., c'est-à-dire le signal de détresse. M. Rocher rentra immédiatement à Molène et prévint le sémaphore. Celui-ci donna l'alarme à 6 h. 15 et les deux canots de sauvetage de Molène ainsi que plusieurs bateaux de pêche se rendirent sur les lieux.
A 8 h. 15. les canots de sauvetage rentraient à Molène, ramenant à leurs bords une partie des 19 hommes d'équipage, un certain nombre d'entre eux étant restés sur le navire avec le capitaine pour ne pas l'abandonner. A ce moment, les cales 1 et 2 ainsi que les compartiments des machines et les chaudières étaient envahis par l'eau, le navire ayant une forte déchirure à l'avant.
La Préfecture Maritime de Brest, alertée par le sémaphore de Molène, prévint M. Raillard, représentant à Brest de la Compagnie de sauvetage des Abeilles, du Havre. Celle-ci donna ordre au remorqueur Cherbourgeois IV de Cherbourg, appartenant à une de ses filiales, de se rendre sur les lieux et ce remorqueur appareilla dans le courant de la matinée avec tout le matériel nécessaire et notamment de fortes pompes pour tenter de renflouer le Beatsa. Le Cherbourgeois IV était attendu ce soir vers minuit au Conquet où il devait embarquer un pilote connaissant bien les parages de Molène, M. Josse, ainsi que MM. Pichard. capitaine d'armement de la Compagnie des Abeilles, arrivé à Brest à 23 h 15 par le rapide de Paris, et Lykiaropulo, représentant les armateurs du Beatsa, qui se trouvait à Brest à l'occasion de la relâche dans notre port pour avaries du vapeur anglais Leaenhall. Ce navire appartient en effet à la même compagnie que le Beatsa, l'Angélus Shipping Co. de Londres. Le Cherbourgeois IV se rendra immédiatement près du Beatsa pour tenter le renflouage. Les cloisons ayant résisté jusqu'à présent à la pression de l'eau, les cales 3 et 4 sont étanches. Cependant l'opération sera extrêmement difficile et ne présente que peu de chances de réussite. D'autre part, dès 9 heures, ce matin, la préfecture maritime de Brest donna ordre au remorqueur Mastodonte, de la Direction du port, de se rendre sur les lieux pour prêter assistance, le cas échéant, au Beatsa. Le Mastodonte appareilla à 10 heures et arriva à 13 heures en vue du navire anglais. La mer étant basse, il ne put l'approcher. Le Beatsa n'ayant même pas flotté à la pleine mer, le commandant du Mastodonte jugea que le renflouage était impossible et à 15 heures il appareilla pour rentrer à Brest où il est arrivé à 16 heures. Les naufragés ont été hébergés au restaurant Tual, à Molène, où des soins empressés leur ont été prodigués. On pense qu'ils seront conduits demain dimanche sur le continent par le remorqueur cherbourgeois n° 4. "
Equipage du Beatsa (Photo Ouest-Eclair)
... Le navire a été bien équipé et navigable. Il portait des canots de sauvetage, Kelvin sonnant la machine, les officiers et les marins brevetés, les cartes de l'Amirauté, les livres de renseignements, un compas standard, un compas de navigation et un compas sur le pont, les bouées de sauvetage, les bouées de sauvetage, les fusées, etc. Les compas étaient réglés dernièrement en 1936.
Après être arrivé à Immingham, avant son dernier voyage, on a demandé pour l'arrivée une nouveau livre de bord, comme l’ancien avait été perdu au voyage précédent. Mais il ne la pas reçu avant son départ.
Le s.s. "Beatsa" est arrivé à Immingham le 16 avril et a appareillé le 20 avril 1937. Il portait un équipage de 19 hommes quand il a quitté ce port, le capitaine, dont le certificat N° : 018725 a été daté le 21 juillet 1890 et qui avait 69 ans et de deux officiers diplômés. Il y avait seulement un ingénieur diplômé à bord au lieu de deux comme exigé par la Section 92 du Merchant Shipping Act, 1894. Il y avait aussi un représentant de chargement des propriétaires. L'ingénieur en chef en voyage a été engagé comme deuxième ingénieur, mais il a manqué de rejoindre le navire avant le départ.
Le SS "Beatsa" a quitté Alicante le 5 mai avec le chargement d'oranges et a relâché à Cartagène où il a accompli le chargement. Il est parti le 8 mai à 6.30 de l'après-midi. Son tirant était 12 pieds 1 pouce à l’avant et 14 pieds 7 pouces à l’arrière avec un chargement d'oranges d'environ 1.000 tonnes. Elle a pris dans les passes à Gibraltar, en arrivant le 9 mai à 10.30 de l'après-midi et est partie de nouveau le midi le 10 mai après avoir reçu 120 tonnes de charbon. Son tirant au départ de Gibraltar était 13 pieds à l’avant et 14 pieds 3 pouces à l’arrière. Aucune certitude quant à l'état du temps de Gibraltar au Cap Villano, a été portée sur de petits morceaux de papier, faisant office de journal de bord. Entre 3 et 16h 00, le 12 mai un relèvement de quatre points a été pris au Cap Villano, qui a donné la position comme entre 5 et 6 miles de, en portant S.E. par E. magnétique, un cap de N. 38 ° E. magnétique a été mis, en permettant 4 ½ ° la déviation d'ouest, pour passer 25 miles à l'ouest d'Ouessant, en faisant une marge sur l'est, le capitaine a considéré que cela permettrait à son navire de passer au moins 10 miles à l'ouest d'Ouessant. Des précautions supplémentaires ont été prises si on rencontrait le brouillard à Ouessant, une telle marge pour l'ensemble du courant était suffisante.
Au Cap Villano les conditions météorologiques étaient vents nord frais d'ouest modéré, ciel couvert, avec une visibilité d'environ 7 miles. Le capitaine a déclaré qu'il avait obtenu un azimut le matin du 12 mai sur N.E. par N. par la compas standard qui a donné 4 ½ ° la déviation d'ouest, qui a confirmé la déviation des compas en d'autres voyages.
Après le Cap Villano aucune observation n'a été prise pour vérifier la position du navire par suite du temps couvert et brumeux. Le 14 mai, le brouillard survient à midi, mais le navire a continué à naviguer à la vitesse complète, en actionnant son sifflet à vapeur aux intervalles réglementaires. Le brouillard est devenu dense après 18h00 au chronomètrent du capitaine qui était sur le pont. Le navire naviguait toujours à la vitesse complète. Les sifflets d'autres navires ayant été entendu entre 20h00 et minuit, mais il est clair que la vitesse a été seulement réduite pour une période entre un quart et une demi-heure de 21h00.
Peu de temps avant, on a entendu des signaux de brouillard de la côte à minuit à environ 2 points sur la coté tribord ou environ 2 points avant la bielle de tribord. Cela prouvait que le bord du navire était de nouveau en conflit.
Le signal de brouillard d'Ouessant opère comme suit : souffle de 3 secondes, silence de 3 secondes, 3 secondes retentissent et un intervalle de 111 secondes, en faisant un total de 2 minutes et des Pierres Noires comme suit : souffle de 2 secondes, silence de 28 secondes, 4 secondes retentissent et silence de 26 secondes, en faisant un total de 1 minute. Le capitaine a déclaré que le signal était 2 souffles toutes les 2 minutes, qu'il a pris pour être d'Ouessant et que le premier officier, qu'il a envoyé à dans la chambre à cartes pour vérifier le signal sur la liste des feux de l'Amirauté, a convenu que cela devait être Ouessant. Comme le premier officier (qui est venu à minuit) était absent à ces débats, la seule certitude disponible de lui, était une déposition faite le 25 juin 1937. Son témoignage a différé de ce que l'on a entendu du capitaine et à plus correspondu aux Pierres Noires qu'à Ouessant. Le deuxième officier (qui était 20 h à minuit) de son propre compte a pris peu d’intérêt à ce qu'il a entendu et n'a fait aucune réelle vérification du signal.
En raison de la position dans lequel le navire a talonné, la demi-heure suivante, la Cour de justice est d’avis que le signal entendu était Les Pierres Noires et pas d'Ouessant.
Il y a là, conflit sur les modifications faites aux caps à suivre. Le capitaine a déclaré que le cap de N. 38 º E. magnétique a été maintenu jusqu'à ce qui ai entendu le signal de brouillard du bord mentionné ci-dessus et qu'après vérification, il a changé le cap de 2 points pour aborder le signal par le travers. Le témoignage du timonier est considérablement au désaccord avec celui du capitaine. La Cour de justice est dans le doute quant aux caps réels suivis, mais elle est disposée à accepter la version du capitaine. La Cour de justice est, pourtant, de l'opinion que la modification faite dans la propre version du capitaine était entièrement insuffisante et qu'il devrait avoir refusé tout de suite toute avance jusqu'à ce qu'il ait correctement vérifié sa position. Une telle vérification pouvait être effectuée en entendant le signal après avoir fait d'arrêter le navire. Ils auraient établi avec certitude que le navire était à l'intérieur de sa position estimée. A son audition, l'ingénieur en chef qui était au moment du talonnage, dans sa cabine, après avoir été de service, de 20h00 au minuit, est allé immédiatement à la chambre des machines. En arrivant il a constaté que tant la chambre des machines que la cale avaient été abandonnées. Il a déclaré que le télégraphe de la chambre des machines était positionné sur « avant toute » et que les moteurs allaient à la vitesse maximum, bien qu'à un nombre réduit de tours. Il a aussi déclaré que les moteurs ont continué à tourner à la même vitesse pendant un temps considérable. D'autre part le capitaine a déclaré qu’au moment du choc, le moteurs a accéléré et s'est arrêté complètement, après quoi, il a sonné le télégraphe pour s'arrêter et puis ensuite le mettre au ralenti avant, mais constatant que le navire n'avait pas bougé, il a de nouveau sonné l'arrêt par le télégraphe. La Cour de justice est de l'avis que la déposition de l'ingénieur en chef sur ce sujet était plus sûre.
A aucun moment après l’échouage, le capitaine n’a donné l’ordre de fermer les portes étanches, au nombre de trois, à savoir une sur chaque côté de la cloison avancée du stokehold conduisant dans les bunkers et la troisième la porte tunnel. La Cour de justice est de l'avis que le capitaine aurait du donner l'ordre de fermer ces portes immédiatement. L'ingénieur en chef étant seul dans la chambre des machines a été nécessairement occupé dans le travail aux pompes et à d'autres choses… Le résultat est qu'il a été impossible de fermer les portes entièrement. En raison de cela, la chambre des machines a commencé à se remplir de l'eau.
Le capitaine avait ordonné aux canots d'être mis à l'eau et sonder autour du navire, les profondeurs de 3 a été trouvée sur l’avancé et 3,5 au milieu du navire et en arrière, il était évident que le navire a été tenu le long de la ligne de quille. L'ancre de tribord a été mouillée et les signaux de détresse ont été renvoyés...
Lieu du naufrage
Une multitude de caisses d'oranges et d'oranges flottaient autour de Molène et venaient échouer à la côte. Une véritable flotte de bateaux annonçait la cueillette. Le bateau repose sur un plateau rocheux de deux à quatre mètres de fond et, à mer basse, l'eau arrive à hauteur de la ligne de flottaison." "La mer, s'acharnant sur l'epave du Beatsa, a fini par arracher de ses flancs, la cargaison de caisses d'oranges. Nos marins pêcheurs en ont recueilli de grosses quantités sur les lieux de pêche et, depuis 48 heures, une centaine de caisses de 50 kgs et davantage ont été débarquées au port. Les services de la douane ont aussitot pris possession de cet arrivage inespéré. Dans la matinée de mercredi, les services de la douane et de l'inscription maritime ont mis ce stock en vente et nombreux furent les Douarnenistes qui purent ainsi acquerir de succulentes oranges parfaitement conservées. Mais…, vers 11 heures, des ordres formels parvenaient au receveur des douanes de Douarnenez de cesser immediatement la vente, cette marchandise étant contingentée. C'est ce qui eut lieu, au désappointement général. Nous voulons croire que ces fruits ne seront pas perdus pour tout le monde et que, avant qu'il soit trop tard, on en fera profiter hopitaux et hospices."
Extraits du jour l'Ouest-Eclair
"Au moment où le chargement allait partir, probablement en direction de Brest, les douaniers surgirent et demandèrent : "Ou allez-vous ?" Les hommes, qui n'etaient plus que trois, répondirent que les six caisses d'oranges que portait leur voiture avaient été recueillies sur la mer, au large. Mais les douaniers opposèrent leur veto au depart des épaves. Hier matin, les délinquants, accompagnés des gendarmes Borvon et Sénéchal, de Lannilis, ont été déférés au parquet de Brest sous l'inculpation : 1. d'importation et de transport en contrebande, par voiture, de marchandises prohibées ou taxées 20 francs et plus les 100 kilos ou soumises à des taxes de consommation interieure; 2. de vol d'épaves et de recel. Ce sont : MM. Joseph Bothorel, 36 ans, mareyeur à Portsall; Pierre Salou, 35 ans, patron du N.-D. de Lourdes et Hippolyte Bramoullé, 37 ans, matelot. Le second matelot, Francois L'Henaff, s'étant séparé de ses collègues à sa descente à quai. Apres avoir été interrogés par M. de Lapeyre, juge d'instruction, les trois contrevenants ont été laissés en liberté. II est possible si, comme c'est l'intention du mareyeur, une transaction intervient entre eux et la Douane, qu'il n'y ait pas de poursuites judiciaires. En attendant, le trio a été laissé en liberté…
"Le 24 octobre 1937 : Le vapeur anglais Beatsa, qui s'échoua près de Serrou, le 15 mai dernier, et qui avait jusque là pu résister à plusieurs journées de forte houle, fut durement secoué. Sous l'assaut des forces déchaînées, ce matin sa cheminée et ses mâts ont disparu. A basse-mer, on apercevait seulement son gaillart avant et la partie basse de sa passerelle dont on remarquait les tôles déchiquetées."