Bataille entre la BELLE POULE et l'ARETHUSE, le 17 juin 1778
Tableau d'Auguste Louis de Rossel de Cercy
L'ARETHUSE était une frégate française, lancée en 1757 pendant la guerre des Sept Ans. Frégate de "8" de 36 canons, contruite par Jean-Joseph Ginoux au Havre et mise à l'eau en décembre 1757, 540 tonneaux (127,3 X 31,8 X 16). Elle a été capturée par la Royal Navy et est devenue l'HMS ARETHUSA, cinquième du nom.
Lancée sous le nom de PELERINE, comme frégate corsaire pour la guerre de course. Peu après son lancement, elle a été achetée par le Roi et renommée ARETHUSE, le 21 janvier 1758.
En juin 1758, sous le commandement du capitaine Vauquelin (1), elle navigue vers Louisbourg que les Anglais assiègent. Elle participe à la défense et repart, en forçant de nouveau le blocus.
Le 18 mai 1759, alors qu’elle se trouve en transit de Rochefort à Brest, sous le commandement du Marquis Vandrenil, elle est interceptée, près de la Baie d'Audierne, par trois navires de la Royal Navy : les HMS THAMES, HMS VENUS et HMS CHATAM. Elle essaye de s'enfuir, mais après deux heures de combat, elle a perdu ses mâts supérieurs et est rattrapée par ses poursuivants. Le THAME et la VENUS l'a retiennent avec un feu nourrit. Elle perd près de 60 marins avant d’amener son pavillon.
Elle rentre en service de la Royal Navy, jusqu'à son naufrage. Ses principales missions consistent à croiser en Manche où elle capture plusieurs corsaires français.
Dimensions | Unités | Equivalent en mètre | |
Longueur hors tout | 132' 2" | Imperial Feet | 40.2844 |
Longueur de la quille | 110' 10 ¾" | Imperial Feet | 33.8011 |
Maître baud | 34' 5 ½" | Imperial Feet | 10.5029 |
Profondeur | 10' 8" | Imperial Feet | 3.2512 |
Déplacement | 700 31⁄94 | Tons BM | |
Armement en septembre 1759 | |||
Pont supérieur | 26 | British 12-Pounder | |
Plage arrière | 4 | British 6-Pounder | |
Gaillard d'avant | 2 | British 6-Pounder |
6/07/1759 Achetée pour un coût de £ 4656.2.3d - 06/07/1759 Reconditionnée à Portsmouth Dockyard 08/10/1759 Montage achevé à Portsmouth Dockyard à un coût de £ 5171.27 - 25/07/1760 Prise du Cutter Le Revanche - 14/02/1761 Prise du corsaire L'Elisabeth - 06/05/1761 Prise du corsaire Le Quimper - 05/10/1762 Prise du navire Udema Perfecta - 08/10/1762 Prise du corsaire L'Amitié
1770-1771 En réparation à Deptford Dockyard - 1771 Réarmée - 1771-1778 La réparation est achevée à Deptford Dockyard pour un coût de £ 8786.164d - 1771-1778 Début de son armement à Deptford Dockyard - 1771-1779 Armement achevé pour un coût de £ 1362.111
24/10/1771 Navigue vers l'Amérique du Nord - 1775-1776 Début de réarmement à Portsmouth Dockyard - 1775-1778 Armement achevé pour un coût de £ 3040.99 - 1778-1773 Reçoit un doublage de cuivre à Plymouth Dockyard pour un coût de £ 3022.11
17/06/1778 Combat contre La Belle Poule 27/07/1778 1ère bataille de Ouessant.
la Belle Poule démâte l'Aréthuse
(Gravure du XVIIIe siècle)
Le 17 juin 1778, la BELLE-POULE (2), frégate de 26 canons est en mission de reconnaissance, avec la frégate de 26, la LICORNE, la corvette HIRONDELLE et le lougre LE COUREUR. Ils rencontrent une escadre britannique, dans laquelle figure l'ARETHUSA.
Depuis toujours, l'ARETHUSE avait eu une réputation de très "bonne marcheuse" et elle est donc la première à atteindre les navires français. Une bataille furieuse contre la BELLE POULE éclate, occasionnant la mort du capitaine en second, le Monsieur Le Grain de Saint-Marceau et 30 membres de son équipage (3).
L'ARETHUSA est sévèrement touchée par la perte d'un mât et doit se retirer, en permettant à la BELLE POULE et la LICORNE d'échapper à l'approche britannique, deux plus petits navires français sont capturés.
Ce combat (4) qui marque le début de la guerre d'indépendance des Etats-Unis a été largement célébré en France comme une victoire, inspirant même une coiffure dans le cercle de la cour du Roi (modèle de Belle Poule). Elle est pourtant aussi considérée comme une victoire en Grande-Bretagne. C’est même devenu le sujet d'une chanson "The Saucy Arethusa".
Le 18 mars 1779, sous le commandement du capitaine Charles Holmes Everitt, l’ARETHUSA rentre en combat contre la frégate française l'AIGRETTE (5), commandée par Mortemart. Considérablement endommagée et désemparée, l'ARETHUSA se brise sur les écueils de Molène. Les 200 rescapés qui s'en échappèrent, voulurent s'emparer de l'île! Mais grâce au sang froid des Molènais et de leur vicaire Joseph BEGOC, ils firent prisonniers les assaillants.
Déclaration de J. Begoc, recteur de Molène, et des habitants notables de l'île, Vincent Tual, Jean Foly, Fiacre Cariou, Yves Marec, Le Floch, commis-greffier, Jean Masson, René Le Goasmeur, Jean Mao :
"portant que les officiers et l'équipage de frégate anglaise, s'étant répandus sur notre île et étant devenus les maitres, nous, distants de trois lieues de mer du Conquet, avons, sur le champ, moyennant nos petites chaloupes, réclamés le secours du sieur Creach, avocat au dit Conquet et celui du sieur Vartel, lieutenant des chasseurs au régiment de Forest, alors au dit Conquet, certifions que ces deux messieurs, nonobstant la fureur de la mer qui était horrible se sont rendus au péril de leur vie, sur notre ile, et que par leurs conseils mutuels, leur bravoure et leur façon d'agir, ils sont venus a bout, avec une vingtaine de soldats du dit régiment, de renfermer et de tenir en respect tous les dits officiera et équipages anglais, jusqu'a ce que nos Messieurs Officiers de Brest, soient arrivés pour les prendre et les constituer prisonniers..."
Come all ye jolly sailors bold
Whose hearts are cast in honour's mould
While English glory I unfold
Hurrah for the Arethusa
She is a frigate tight and brave
As ever stemmed the dashing wave
Her men are staunch to their favorite launch
And when the foe shall meet our fire
Sooner than strike we'll all expire
On board of the Arethusa
'Twas with the spring fleet she went out
The English Channel to cruise about
When four French sail in show so stout
Bore down on the Arethusa
La coiffure Belle-Poule
C'est apparemment la gloire de l'ARETHUSA, qui a incité la Royal Navy, pendant deux siècles, à accorder ce nom (voir ARETHUSA HMS) le plus utilisé pour ses navires et pour deux classes consécutives de croiseurs (croiseur de classe ARETHUSA).
La position exacte de l'Arethusa n'est hélas pas encore connue avec certitude. Des passionnés s'y attellent. Espérons que cette page les aidera et souhaitons leur bonne chance.
1. "Vauquelin, Jean (1728-1772), capitaine dans la marine marchande vers 1750, il effectue 21 campagnes avant d'être recruté, au début de la guerre de Sept Ans, par le commandant de la marine au Havre pour servir comme officier bleu. En février 1758, comme lieutenant de frégate, Vauquelin se voit confier le commandement de la Pèlerine, une frégate de 30 canons récemment achetée par le roi à un armateur du Havre et rebaptisée Aréthuse ( 21/05/1758). Envoyé à l'île Royale (île du Cap-Breton), Vauquelin réussit à entrer dans le port de Louisbourg, le 9 juin, malgré le blocus d'Edward Boscawen, et prend une part très active à la défense de la place. L'Aréthuse, embossée près de l'anse du Barachois, gêne considérablement les opérations de débarquement des Anglais en les prenant à revers et en les tenant sous son feu ; son tir précis provoque chez eux des pertes considérables et retarda de manière notable l'avancement des travaux du siège. Au début du mois de juillet, Vauquelin obtint du gouverneur Augustin de Boschenry de Drucour l'autorisation de passer en France pour y porter des dépêches et informer le ministre de la Marine du triste état de la place. Il appareille dans la nuit du 14 au 15 juillet, forçe une seconde fois le blocus anglais et parvient sans encombre en Europe après une traversée très rapide, puisque l'Aréthuse mouille à Santander, en Espagne, le 2 août. Cette brillante campagne vaut à Vauquelin une lettre de félicitations du ministre". Source : "L'inventaire des lieux de mémoire de la Nouvelle-France au Québec".
2. La Belle Poule était une frégate de 43 mètres pour une jauge de 650 tonneaux, armée de 30 bouches à feu : 26 de XII et 4 de VI. 260 hommes vivaient à son bord. Le seul coût des décorations, dues au talent de Martial Cessy, sculpteur à Bordeaux, s'élèvent à huit cent cinquante livres. Elle fut le tout premier bâtiment de la Royale qui reçut un doublage en cuivre en 1772. Après deux campagnes aux Antilles elle parti entre 1772 et 1776 pour une campagne lointaine de missions océanographiques dans l'océan indien avec une finalité scientifique mais aussi commerciale en raison de la proximité des comptoirs français des Indes.
La Belle Poule était placée sous le commandement du Chevalier de Grenier et avait à son bord un jeune officier qui n'allait pas tarder à devenir illustre : un certain Jean-François de Galaup, comte de Lapérouse.
Revenue en France la Belle Poule fut prise en chasse au cours le 27 avril 1777 par un vaisseau britannique alors qu'elle naviguait sur nos côtes au large de l'île de Groix, mais sa rapidité lui permis de rejoindre le port de Brest sans encombre. Source : Christian SOURDAINE
3. Chadeau de la Clocheterie est chargé par le Lieutenant-Général d'Orvilliers, commandant la flotte de l'Atlantique, d'une mission de surveillance maritime en Manche occidentale. Il s'agit plus particulièrement de suivre les mouvements de l'escadre anglaise placée sous les ordres de l'Amiral Keppel. Pour mener à bien cette mission il dispose de quatre vaisseaux : la Belle Poule, la frégate Licorne dotée de 26 canons, la corvette Hirondelle disposant de 16 canons et le Coureur, lougre armé de 8 canons.
Partis de Brest le 15 juin 1778 les Français aperçoivent à l'horizon, dans la matinée du 17, les mâts de la flotte anglaise forte de d'une vingtaine de navires. Bientôt la Belle Poule et l'Aréthuse, frégate armée de 28 canons de 12 en batterie, se trouvent par le travers l'une de l'autre à portée de mousquet. D'abord on parlemente. L'Aréthuse somme Chadeau de la Clocheterie de se rendre sans combat. Puis soudain l'anglais adresse une bordée et le combat s'engage entre les deux frégates, courant grand largue vers terre, alors que la brise est faible et que la nuit commence à tomber. Il durera de 18 à 22 heures. Le faible vent permet à peine aux navires de manoeuvrer. Démâtée et brisée par les coups, la Belle Poule concentre son feu sur la poupe de son adversaire occasionnant de nombreux dommages et faisant de nombreux morts et blessés : "Je lui ai donné plus de 50 coups de canon dans sa poupe sans qu'elle ait riposté un seul". Grâce à une bonne brise retrouvée, l'Aréthuse va rechercher protection au sein de l'escadre anglaise. La Belle Poule ne peut la suivre sans risquer gros.
La Belle poule a payé cher sa victoire. On compte une quarantaine de morts dont Monsieur Le Grain de Saint-Marceau, le capitaine en second, originaire de Granville, et une soixantaine de blessés. Monsieur Delaroche-Kerandron, l’enseigne, a un bras cassé et Monsieur Bouvet est blessé moins grièvement.
Dans son rapport au Lieutenant-Général d'Orvilliers, Chadeau de la Clocheterie, blessé lui-même à la tête et la jambe, rend hommage au courage de ses officiers et de ses hommes :
"Je ne saurais trop louer, mon général, la valeur intrépide et le sang-froid de mes officiers : Monsieur le Chevalier de Cappellis a su inspirer toute son audace aux équipages dans la batterie qu'il commandait. Monsieur de La Roche, blessé après une heure et demie de combat, est venu me faire voir son bras, a été se faire panser et est revenu reprendre son poste. Messieurs Mamard et Sbirre, officiers auxiliaires, se sont comporté avec toute la bravoure qu'on a droit d'attendre des militaires les plus aguerris. Monsieur Bouvet, blessé assez grièvement, n'a jamais voulu descendre. Mon équipage est digne de partager la gloire que se sont acquis mes officiers."
Les dommages causés à la Belle Poule sont considérables. Les voiles sont déchirées et criblées d'éclats, les mâts hors d'usage, la coque fait eau. Malgré la surveillance exercée par deux bâtiments de guerre anglais, deux navires français venus de Brest avec une centaine de matelots aguerris et familiers des dangers de la côte, réussissent à ramener la Belle Poule à Brest. L'accueil y est triomphal. Chadeau de la Clocheterie est promu capitaine et son équipage reçoit du Roi, honneurs, avantages et pensions. Le retentissement à la Cour et dans toute la France est considérable. le courage des officiers et de l'équipage suscite une admiration générale.
4. Cette victoire semble bien plus symbolique que réelle. En effet les autres navires qui accompagnaient la Belle Poule ont subi un sort bien funeste. Si l'Hirondelle a pu se réfugier sans dommage à l'île de Batz, le Coureur avait dû amener pavillon après un combat meurtrier contre le sloop l'Alert et la Licorne sous les ordres du lieutenant de vaisseau Gouzillon de Belizal dut se rendre à l'Amiral Keppel. Source : Christian SOURDAINE
5. AIGRETTE - Frégate de 32 canons type Blonde (1756 - 1788) Chantier : Le Havre. Commencé : 09/1755 ; Mis à flot : 03/1756 ; En service : 07/1756 ; Retiré : 1788. Caractéristiques : 480 à 540 t ; 40,3 x 10,3 x 5,3 m ; Ginoux ; XXVI.8 + IV.4. Observations : 14/11/1759 : Bataille des Cardinaux, réfugiée dans la Vilaine (cdt de Longueville) ; 27/9/1765 : Sort du bassin après refonte à Rochefort ; 9/1773 : Ramène en France le chevalier de Kerlérec gouverneur de la Guyane à la fin de la guerre de sept ans ; 1775 : Levant (cdt Balleroy) ; 18/3/1779 : Chassée par HMS ARETHUSA au large d'Ouessant, parvient à se dérober dans la nuit alors que HMS ARETHUSA fait naufrage peu après à Molène (LV Mortemart) ; 1781-82 : Campagne aux Amérique et Antilles (escadre De Grasse) ; 1781 : Capture (cdt J-B Traversay) frégate HMS RICHMOND ; 7-8/1781 : Envoyée à la Havane pour y chercher des fonds fournis par le gouvernement espagnol, rallie De Grasse dans le canal des Bahamas avec 500 000 piastres ; 9/1781 : Transport de troupes d'Annapolis à la James River pour le siège de Yorktown (division La Villebrune) ; 10/1789 : Condamnée à Brest. Source : Dictionnaire des bâtiments de la Flotte de guerre française de Colbert à nos jours, Lieutenant de vaisseau Jean-Michel Roche.