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Date de mise à jour : 30/10/2017 (60 nouvelles épaves, 41 mises à jour)

"L'EPAVE AUX ARDOISES"

Chasse-marée français début XIX eme

Plan des vestiges

Plan du site (dessin M.P. Brin)

Sondages 1995-1996, Fouilles programmées 1996-2000
G.E.D.A.S.M. (Groupe d'Etudes & de Découvertes Archéologiques Sous-marines du Morbihan)
Directeurs de fouilles :
Marie-Pierre Brin, Dominique Le Halpert, Claude Rabault

 

Le chantier archéologique

Fortuitement découvert en 1992 par une équipe du GEDASM, le site archéologique, dit de "l'épave aux ardoises", gît par dix mètres de fond, dans la baie de Kerjouanno, entre Saint Gildas de Rhuys et Arzon (Morbihan).
À l'origine, il se présentait sous la forme d'un tumulus d'ardoises. Grâce à cette cargaison pondéreuse, l'épave s'est enfoncée dans le sédiment et les oeuvres vives sont parvenues jusqu'à nous.
L'étude du chargement' a révélé trois tailles d'ardoises, correspondant à des couvertures dites à pureau décroissant, et l'étude minéralogique a permis d'identifier la cargaison comme une production angevine. L'analyse architecturale des formes et des procédés de construction, qui se poursuit aujourd'hui, a pour sa part révélé un petit caboteur de trente pieds de quille, construit sur membrure double.
Les trois cales du navire sont apparues lors du dégagement du tumulus. On a pu y reconnaître à l'avant le stockage des voiles et des cordages, au centre celui de la cargaison et, à l'arrière, le lieu de vie de l'équipage. La présence de nombreuses briques de four et de vestiges de petits bois atteste de l'existence d'un foyer à bord. La diversité du mobilier retrouvé, sablier de loch, flacons à encre, pichets, tuyaux de pipe, bouteilles, semelle de chaussure, pierres de tuffeau, pelle à sel, brosse, poulies, réas et cordage, offre un témoignage émouvant de la vie de l'équipage, mais n'a toujours pas permis d'identifier le navire.
Longtemps privilégiée, l'hypothèse du Florissant, de Roquedeteau, naufragé en 17692, s'est envolée avec la découverte, en 1995, d'une pièce de deux sols dont la frappe n'a débuté qu'en 1791.

2 sols

L'étude dendrochronologique a par ailleurs apporté la certitude que les bois de construction, originaires du Morbihan, avaient été coupés entre 1810 et 1821. En admettant l'hypothèse que le navire ait été construit entre 1821 et 1830 et qu'il ait eu une durée moyenne de vie le vingt ans, il a été possible de retrouver aux archives départementales du Morbihan la trace l'une quinzaine de caboteurs de 18 à 26 tonneaux naufragés pendant cette période. Si les archives ne parlent qu'à mi-voix, certains indices archéologiques ont cependant éveillé notre curiosité. Il en est ainsi d'une pièce d'écubier, sculptée de trois arcs de cercle emboîtés, mise au jour en 1997.

Cette décoration apparaît en effet sur plusieurs plans, datés du milieu du XIXe siècle, provenant des chantiers de construction Le Fol à Vannes ou à Auray. Cette famille vannetaise construisit, à cette époque, nombre de navires sur la rive gauche du port. On serait donc tenté d'assimiler le motif décoratif de l'écubier à une signature de construction mais il importe sans doute de rester prudent, bien qu'il soit évident que ces deux ports étaient, aux XVIIIe et XIXe siècles, les berceaux de la construction de petites unités de commerce, et particulièrement des chasse-marées.
On ne peut donc aller jusqu'à affirmer que le navire de Kerjouanno était un chasse-marée construit par les chantiers Le Fol, mais nous l'assimilons cependant volontiers aujourd'hui à une construction de Bretagne sud. L'étude de Kerjouanno devrait ainsi contribuer à terme à éclairer d'un jour nouveau l'histoire du cabotage et de la construction navale au début du XIX' siècle dans le sud de la péninsule armoricaine.

La fouille archéologique de cette épave a successivement ou collectivement été dirigée par Claude Rabault, Dominique Le Halpert et M.P. Brin. Les résultats ont fait l'objet de comptes rendus réguliers ans les Bilans scientifiques du Drassm (BS, 1994, p. 20-21 ; 1995, p. 20-21 ; 1996, p. 55-58 ; 1997, p. 20-22 ; 1998, p. 14-15 ; 2000, p. 26-28). 2 Cf. A.D. 56, 9B 218-220. 3 Réalisée sur treize prélèvements, en 1998, par Vincent Bernard (UNIR 6566, université Rennes-I), elle a révélé des bois portant des traces d'émondage, ou prélèvement des branches, ce qui suppose des arbres provenant d'espaces ouverts, tels que des haies bocagères, et non de futaies.

Le chargement, d'environ 4 tonnes d'ardoises, avait enfoui les oeuvres vives d’un caboteur de petites dimensions (12 à 15 mètres) et de 20 à 40 tonneaux de jauge.

Les caractéristiques du navire :
Les relevés de charpente, les mesures accumulées, nous permettent de dresser un portrait robot de l'épave. Il s'agit d'un petit caboteur, probablement un chasse-marée, dont les cotes sont les suivantes :
- longueur hors tout de 35 à 37 pieds (11,5 à 12 mètres).
- maître baud de 12,5 à 14,5 pieds (4,2 à 4,7 mètres).
- creux de 6,7 à 8,3 pieds (2,2 à 2,7 mètres).
La jauge, déduite de ces mesures, est comprise entre 53 et 76 m3, soit une fourchette de tonnage de 19 à 26 tonneaux.

Chasse-marée
Chasse-marée du XIXeme

Objectifs :

La fouille archéologique avait pour buts :
Une étude approfondie du chargement : examen des procédés de chargement et évaluation de la quantité d’ardoises et du volume transporté.
Une décription de la navigation et la vie quotidienne de l'équipage d'un petit caboteur par la collecte de mobilier. De nombreux artefacts s'étaient logés dans cet espace compris entre la quille et la carlingue. La poupe du navire était vraisemblablement, compte tenu du volume occupé par le chargement, le "lieu de vie de l’équipage".

Sablier de loch Flacons à encre Sifflet de manoeuvre
Sablier de loch (photos GEDASM) Flacons d'encre Sifflet de maître

Une tentative de comprendre les méthodes de construction de ces petits caboteurs. La documentation iconographique du XVIIIeme et du XIXeme ne révèle que des formes générales et ne permet de saisir que l’extérieur des navires, de plus la pauvreté de la documentation sur les méthodes, les usages de construction, les échantillonnages utilisés par les charpentiers et petits constructeurs des navires de commerce, font que l’intérêt de cette épave réside principalement dans l’étude complète de sa charpente. Cette fouille a permis également, au travers de nos recherches en archives, une description du cabotage côtier au XIXeme siècle en Bretagne.

Coupe de l'épave
Plan de coupe de l'épave (Dessin M. P. Brin

Relevage de la cargaison

Cargaison ardoisesRelevage des ardoises
La cargaison sur le fond - Relevage

Rapport :

Rapport de fouille disponible sur demande : Epave dite "Aux Ardoises", Baie de Kerjouanno, Arzon, Morbihan : rapport 1996 DRAC Bretagne - Archéologie (15 PER 27)